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III - NOTRE-DAME DE LA POURRITURE (1) 4/4
Dieu est loin. Il est le grand introuvable. L’homme croit en Dieu parce qu’il ne peut pas se prendre en charge quand il est mort. Mais pour enciller Dieu, il ne suffit pas de le tuer ou constater sa mort. Si la négation de la Religion n’entraîne pas un nouveau mysticisme métaphysique, et plus violent encore, autant rester catholique, apostolique, agenouillé. La réalité n’est pas d’ici : elle a déménagé ! Ah ! L’Erreur des cons ! C’est la Pavane monstrueuse de cette époque anthologique et désincarnée que d’avoir entre les mains la connaissance des choses à détruire. Tout faux. Tout à côté. Sans aucun doute, toute cette question ne sera plus de mise du tout dans quelques années. Rira bien qui croira le dernier. On prendra d’ici peu toute la Religion à la Rigolade, car plus personne n’aura la force de chier Dieu, pas plus, du reste, que de l’adorer. Tout sera pour le pire. Je vais me régaler. Comme toujours.
Tout le monde sait que le christianisme fut le plus grand fléau que la terre n’ai jamais supporté, mais on lui pardonne parce que nous sommes tous absolument catholiques. Qu’on lui pardonne parce qu’on trouve ça très bien, parce qu’on n’y croit pas, parce qu’on le hait ou parce qu’il a engendré les plus hautes œuvres d’art de tous les temps : c’est scrupuleusement pareil. On confond la Bible et les génèses, l’Immortalité de l’Ame et l’Existence de Dieu, Jésus et l’Homme, le Destin et le Hasard, le Déluge et l’Apocalypse, et, par-dessus tout : Dieu et la Mort. Le christianisme a toujours bavé sur la mort. Ils ont du mal à ne pas admettre, les dévots, que pour toute divinité – et c’est déjà énorme – la mort ne nous offre guère que sa pourriture et que l’au-delà véritable c’est, sans aucune promesse de glorieuse résurrection, la Décomposition. Je donnerais cher pour glisser dans les dates du calendrier une fête de la Décomposition dont toutes les « Pietàs », j’en suis certain, me sauraient gré…
Je suis convaincu – et tout mystique sera d’accord avec moi – que la Religion n’est pas vraiment religieuse. Le Clérical et l’Anticlérical, c’est le même homme. Il n’y a pas de quoi être si fier d’avoir lu la Bible.
Quand on parle de moi, il ne faut pas oublier que j’ai été baptisé catholique sur l’ordre intime d’une orthodoxe et que je ne me suis jamais confessé. Je n’ai pas fait ma communion. Je ne suis jamais allé, ni à un mariage, ni à un baptême, ni à un enterrement ; je n’ai jamais assisté à une messe ; je n’ai jamais prié ; et, encore plus fort dans l’Ignorance : je n’ai pas lu la Bible. Depuis toujours, j’ai pensé salutaire pour ma pulsion religieuse de me tenir absolument détaché du Texte… Même Nietzsche, même Rebatet n’ont pas eu la force de ce mépris ! « Je ne sais pas lire » : c’est de cette constatation qu’est venu mon effort pour tout ignorer, et ce, avec une rigueur que beaucoup me reprocheront tout en n’y croyant pas, j’en suis sûr (de la même façon qu’on croit plus facilement en Dieu qu’en moi, parce que je n’ai pas lu la Bible !), pour refuser tout catéchisme, pour jouer dans le grenier d’une maison sans fondations.
Je n’irai pas jusqu’à dire que si je suis si religieux, c’est parce que je n’ai pas lu la Bible. Cependant, j’ai vu tant de pseudomystiques se perdre dans les évangiles jusqu’à diminuer le sacré des autres bibles, que je me suis méfié : j’ai voulu me tenir en dehors de ce coup-là. Urbi or not Orbi… Moi, j’ai préféré construire toute ma pensée sur un vide à la façon d’un funambule, ou sur un manque si vous y tenez, comme une sorte de « fauché ». Pour tout dire, j’ai préféré m’en tenir aux bibles plutôt qu’à la Bible. J’ai bâti ma pensée religieuse sur un Ignorantinisme Polybiblique : à quoi me condamnez-vous ? Je sais mieux que personne que je m’offre aux malédictions les plus sanglantes que jamais écrivain ne s’est vu balancer : ne pas avoir lu la Bible est certainement le péché qu’on ne peut pas pardonner à un mystique de mon acabit. Ceux qui refusent Dieu m’en voudront plus que ceux qui le nourrissent. Quel est ce duel sans armes ? Qui sont-ils ceux qui lisent la Bible sans y croire ? Que faut-il penser des matérialistes qui cherchent dans la Bible l’Inexistence de Dieu ? *
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