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    Je suis un évadé.
    Du jour de ma naissance
    En moi-même reclus,
    Je me suis fait transfuge.

    Puisqu’il faut qu’on se lasse
    D’être en un même lieu,
    Pourquoi ne se lasser
    D’être à soi toujours égal ?

    De moi mon âme est en quête
    Mais je bats la campagne,
    Fasse le ciel qu’elle
    Ne me trouve jamais.

    N’être qu’un est une geôle ;
    Être moi, c’est n’être point.
    Dans la fuite je vivrai –
    Pourtant bel et bien je vis.

    Fernando Pessoa

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    Bleus de la profondeur,
    Nous n'en finirons pas
    d'interroger votre mystère.

    L'illimité n'étant
    Point à notre portée,
    il nous reste à creuser, ô bleus

    Du ciel et de la mer,
    Votre mystère qui n'est autre
    que nos propres bleus à l'âme.

    François Cheng

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    Amour, je prends congé de ta menteuse école,
    Où j’ai perdu l’esprit, la raison et le sens,
    Où je me suis trompé, où j’ai gâté mes ans,
    Où j’ai mal employé ma jeunesse trop folle.

    Malheureux qui se fie en un enfant qui vole,
    Qui a l’esprit soudain, les effets inconstants,
    Qui moissonne nos fleurs avant notre printemps,
    Qui nous paît de créance et d’un songe frivole.

    Jeunesse l’allaita, le sang chaud le nourrit,
    Cuider l’ensorcela, paresse le pourrit,
    Entre les voluptés vaines comme fumées.

    Cassandre me ravit, Marie me tint pris :
    Jà grison à la Cour, d’une autre je m’épris,
    L’ardeur d’amour ressemble aux pailles allumées.

    P. de Ronsard

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    Sonnet

    À quoi pense la Nuit, quand l'âme des marais
    Monte dans les airs blancs sur tant de voix étranges,
    Et qu'avec des sanglots qui font pleurer les anges
    Le rossignol module au milieu des forêts ?...

    À quoi pense la Nuit, lorsque le ver luisant
    Allume dans les creux des frissons d'émeraude,
    Quand murmure et parfum, comme un zéphyr qui rôde,
    Traversent l'ombre vague où la tiédeur descend ?...

    Elle songe en mouillant la terre de ses larmes
    Qu'elle est plus belle, ayant le mystère des charmes,
    Que le jour regorgeant de lumière et de bruit.

    Et — ses grands yeux ouverts aux étoiles — la Nuit
    Enivre de secret ses extases moroses,
    Aspire avec longueur le magique des choses."

    Maurice Rollinat

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