• Corps nu, moiré par l'ombre

    Corps :
    Attention

     

    Son corps reposait sur le drap, nu, moiré par l'ombre, la lune n'éclairant que son flanc et ses épaules. Gaspard se leva et ouvrit la fenêtre; la pièce sentait l'amour, l'odeur fade du plaisir de l'homme, et celle citronnée, musquée, de la femelle. Il la regarda encore. Sa respiration était profonde, sensuelle, on eût dit que l'air s'engouffrant dans son corps la chauffait, la caressait jusqu'à ce qu'elle l'expire. La noblesse d'un animal, pensa-t-il, cette noblesse naturelle, les membres déliés, ce corps qui fait un, et qui n'est pas la vulgaire somme d'éléments divers, de jolis seins, de jolies fesses, un beau minois. Ici il n'y avait rien à détailler. Il écouta son souffle régulier, la fragilité de la vie en elle; il réalisa qu'avec sa force d'homme, cent fois dans la nuit il aurait pu la blesser; il songea avec délices que par trois fois, dans leurs transports, sous l'effet du plaisir, elle avait manqué l'étrangler. Il connut la tendresse et voulut l'embrasser sur le front; un grognement agressif lui répondit.

    "La secte des égoïstes" Eric-Emmanuel Schmitt *

    « Orthodoxie. Consécration de la Cathédrale russe de la Sainte Trinité à ParisUn regard de rien * »
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