• Roses trop rouges de mon désir

     

    Roses trop rouges de mon désir,
    Je vous effeuille au bord de cette onde
    Où venait se mirer le Plaisir
    Sous son masque usé comme le monde.

    Du bleu des monts où naît le matin
    Cent bateaux dont la poupe se bombe
    Se laissent voguer, lourds de butin,
    Vers la mer où le soleil succombe.

     
    Mon âme amante des nénufars
    Voit passer devant elle la flotte
    Brave de clairons et d’étendards
    Sans ouïr l’appel du roi-pilote.

    C’est demain le réveil en la mer
    Pour ceux-là qui descendent le fleuve.
    — Écoute les cloches de l’hiver,
    Qui sonnent pour les autres l’épreuve.

    Et prie à genoux parmi les fleurs
    Roses trop rouges que tu tortures,
    Nénufars où pleurent tes douleurs.
    Pour tous les fous de ces aventures.

    La nuit douce à tes souvenirs las
    Pose ses pas d’oubli sur la grève.
    Dors au pays des fleurs et des glas
    Et rêve que la vie est un rêve.

    Petits poèmes d’automne -  Stuart Merrill *

     

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