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Je ne tirais pas
Je ne tirais pas, mais j'étudiais les hommes qui tiraient, les officiers surtout comme Häfner ou Janssen, qui étaient là depuis le début et semblaient maintenant devenus parfaitement insensibles à leur travail de bourreau. Je devais être comme eux. En m'infligeant ce lamentable spectacle, pressentai-je, je ne visai pas à en user le scandale, le sentiment insurmontable d'une transgression, d'une violation monstrueuse du Bien et du Beau, mais il advenait plutôt que l'habitude, on ne sentait, à la longue, plus grand chose ; ainsi, ce que je cherchais, désespérément mais en vain, à recouvrer, c'était bien ce choc initial, cette sensation d'une rupture, d'un ébranlement infini de tout mon être ; à la place je ne ressentais plus qu'une excitation morne et angoissante, toujours plus brève, acide, confondue à la fièvre et à mes symptômes physiques, et ainsi, lentement, sans bien m'en rendre compte, je m'enfonçais dans la boue tandis que je cherchais la lumière.
"Les bienveillantes" Jonathan Littell
« Jean GIONO : "Naissance et vie des personnages"Felix Mendelssohn Bartholdy (1809-1847): Klavírní koncert d-moll op.40 »
Tags : tirais, bien, cherchais, ainsi, scandale
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