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échapper à la veuve noir
est à tous points de vue un miracle.
elle file des toiles gigantesques
et vous y attire en douceur
elle vous y enlace
et quand elle s'est satisfaite
elle vous liquide
car tout en continuant de vous embrasser
elle vous suce le sang jusqu'à la moelle.j'ai échappé à ma veuve noire
parce qu'elle avait trop de mâles
dans sa toile
et pendant qu'elle en embrassait un autre
puis un autre et encore
un autre
je me suis frayé un chemin
pour revenir
là où j'étais avant.elle me regrettera -
non par amour
mais pour le goût de mon sang ;
comme elle n'a pas sa pareille, elle
trouvera bien un autre sang ;
elle est si fabuleuse que j'ai presque
regretté qu'elle ne m'ait pas tué
presque mais pas tout à fait ;
je lui ai échappé pour retomber dans d'autres
toiles.
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Pendant que je jouissais d’un mois de beau temps au bord de la mer, le hasard me jeta dans la compagnie d’une créature pleine de séductions : une vraie déesse à mes yeux, aussi longtemps qu’elle ne fit aucune attention à moi. Je ne lui dis jamais mon amour de vive voix ; mais, si les regards ont un langage, le plus pur idiot aurait pu deviner que j’étais amoureux par dessus la tête ; enfin elle me comprit ; elle me répondit par un regard — le plus doux de tous les regards imaginables. Et moi, que fis-je ? Je l’avoue avec honte ; je me renfonçait froidement en moi-même comme un colimaçon ; à chaque regard, je me retirais davantage, jusqu’à ce qu’enfin la pauvre innocente en vint à douter de ses sens, et toute remplie de confusion de son erreur supposée, persuada à sa mère de partir. Par ce curieux retour de mes dispositions, j’ai gagné la réputation d’un être délibérément pervers ; réputation combien injuste, moi seul puis l’apprécier.
E. Brönté "Un amant" *
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