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    les hôpitaux, ça me connaît
    quand tu vois accrochés aux murs les crucifix
    avec coincée derrière la branche de buis
    jaunie et fanée

    prépare-toi à accepter l'inéluctable

    mais ce qui te brise vraiment
    ce sont les pots de chambre
    si durs sous ton cul
    et bien que tu agonises
    tu dois nécessairement t'assoir sur
    cet abominable objet
    et pisser et
    chier dedans

    tandis que dans le lit
    à côté du tien
    une famille de 5 personnes vient réconforter
    un incurable
    un cardiaque
    un cancéreux
    ou un mec pourri jusqu'aux os.

    le pot de chambre est une épreuve terrible
    et un horrible sujet de moquerie
    et tout ça parce qu'on se refuse à vider ton
    corps moribond
    de sa merde

    tu pourrais t'en charger
    mais les barreaux sont trop hauts :
    tu es comme un enfant au fond d'un berceau
    au fond du tout petit berceau de la mort
    et quand l'infirmière revient te voir
    une heure et demie après
    et qu'il n'y a rien dans le pot de chambre
    tu as droit à son regard
    sévère et méchant

    comme si, proche de la fin,
    tu étais encore capable de faire
    les choses les plus simples
    à volonté
    en tout cas si tu sens que ça vient
    laisse-toi aller
    et lâche
    tout dans les draps

    évidemment, tu les entendras
    et non seulement l'infirmière
    mais aussi
    tout les autres malades...

    le plus difficile dans la mort
    c'est qu'ils attendent
    que tu disparaisses
    tel un coup de feu dans un ciel
    sans étoiles.

    quelquefois ça peut se passer comme ça

    mais quand tu veux réclamer la balle et le fusil
    et que tu relèves la tête
    tu constates
    que les fils
    de la sonnette
    ont été coupés
    arrachés
    ce qui les rend
    tout aussi inutiles
    que les pots de chambre.

    Charles Bukowski *

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  • L'origine du monde :
    Attention

    Le diplomate turco-égyptien Khalil-Bey (1831-1879), figure flamboyante du Tout-Paris des années 1860 était le premier propriétaire de L'Origine du monde, et certainement son commanditaire... Il avait ressemblé une éphémère mais éblouissante collection dédiée à la célébration du corps féminin.

    En 1995 le célèbre tableau de Gustave Courbet fait son entrée au musée d'Orsay. "Courbet n'a cessé de revisiter le nu féminin, parfois dans une veine franchement libertine. Mais avec L'Origine du monde, il s'autorise une audace et une franchise qui donnent au tableau son pouvoir de fascination. La description quasi anatomique d'un sexe féminin n'est atténuée par aucun artifice historique ou littéraire. Grâce à la grande virtuosité de Courbet, au raffinement d'une gamme colorée ambrée, L'Origine du monde échappe cependant au statut d'image pornographique. La franchise et l'audace de ce nouveau langage n'excluent pas un lien avec la tradition : ainsi, la touche ample et sensuelle et l'utilisation de la couleur rappelle la peinture vénitienne, et Courbet lui-même se réclamait de Titien et Véronèse, de Corrège, et de la tradition d'une peinture charnelle et lyrique. L'Origine du monde, désormais présenté sans aucun cache, retrouve sa juste place dans l'histoire de la peinture moderne. Mais il ne cesse pourtant de poser d'une façon troublante la question du regard."

    Hier, je suis allée au musée d'Orsay pour voir l'exposition consacrée au "nu masculin". Confrontation des œuvres à travers les époques. La nudité et le nu : le corps dépouillé de vêtements, la gêne qu'il suscite par l'absence de pudeur. "Dans leur grande majorité des hommes, les artistes trouvent dans le nu masculin un "moi idéal", miroir magnifié et narcissique d'eux-mêmes. Jusqu'au milieu du XXe siècle, l'organe sexuel fait pourtant l'objet d'une certaine pudeur, qu'il soit atrophié ou bien dissimulé sous quelque draperie, lanière ou fourreau d'épée subtilement placés."

    C'est dans la dernière salle que je découvre un tableau dont j'ignorais l'existence... Il s'agit de "L'origine de la guerre" d' Orlan

    L'origine de la guerre :
    Attention

    Elle s'est inspirée du tableau L'Origine du Monde de Gustave Courbet , en présentant un gros plan du bas-ventre d'un homme, les jambes écartées, le sexe en érection.  Orlan détourne l’œuvre grâce aux moyens de la photo et des logiciels de retouche tout en reprenant exactement le même format, la même composition et la même tonalité colorée. Pour accentuer encore le détournement parodique elle replace le nouveau "tableau" dans un cadre baroque.

    Je me suis fait une réflexion suivante : dans le tableau de Courbet la femme est en position d'attente , "passive" ... chez Orlan l'homme est "en action"... Exprime-t-il le désir? Désir d'argent, du pouvoir...
    Face-à-face entre l'homme et la femme? La guerre des sexes?

    Un sujet à réflexion...

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  • Les yeux de tous:
    Attention

     Tu me demandes comment cela est venu jusqu’à moi ; qui m’a pu dire ta pensée que tu n’avais dite à personne ? « Celle qui sait tant de choses : la renommée. » Quoi ! diras-tu, suis-je assez important pour mettre la renommée en émoi ? – Ne te mesure pas sur l’endroit où je suis, mais sur celui que tu habites. Qui domine ses voisins est grand où il domine. La grandeur n’est pas absolue : elle gagne ou perd par comparaison. Tel navire, grand sur un fleuve, est fort petit en mer ; le même gouvernail, trop fort pour tel navire, est exigu pour tel autre. Toi aujourd’hui, tu as beau te rapetisser, tu es grand dans ta province : tes actions, tes repas, ton sommeil, on épie, on sait tout. Tu n’en dois que mieux t’observer dans ta conduite. Mais ne t’estime heureux que le jour où tu pourrais vivre sous les yeux du public, où tes murailles te défendraient sans te cacher, ces murailles que presque tous nous croyons faites moins pour abriter nos personnes que pour couvrir nos turpitudes. Je vais dire une chose qui peut te faire juger de nos mœurs : à peine trouverais-tu un homme qui voulût vivre portes ouvertes. C’est la conscience plutôt que l’orgueil qui se retranche derrière un portier. Nous vivons de telle sorte que c’est nous prendre en faute que de nous voir à l’improviste. Mais que sert de chercher les ténèbres, de fuir les yeux et les oreilles d’autrui ? Une bonne conscience défierait un public ; une mauvaise emporte jusque dans la solitude ses angoisses et ses alarmes. Si tes actions sont honnêtes, qu’elles soient sues de tous ; déshonorantes, qu’importe que nul ne les connaisse ? tu les connais, toi. Que je te plains, si tu ne tiens pas compte de ce témoin-là !

    Sénèque - Lettres à Lucilius

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