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Par Cruella le 21 Décembre 2022 à 09:30
Amour m’a fait la cible de la flèche,
Je suis neige au soleil, cire dans le feu,
Brume que vent disperse. Ma voix s’enroue,
Ma dame sans pitié, à vous crier « Grâce ».
Vos yeux, c’est eux qui m’ont porté le coup mortel
Que ne pourront ni temps ni lieu guérir,
De vous seule dépendent, et c’est votre jeu,
Le soleil, le feu et le vent dont je suis la proie.
Car les pensées sont flèches, soleil est ce visage,
Et feu est le désir. Et de ces armes
Amour me perce, m’aveugle, me consume.
Cependant que ce chant, ces mots dignes des anges,
Et cette douce haleine qui me tue,
Sont la brise qui fait que ma vie dérive."Je vois sans yeux et sans bouche je crie" Pétrarque *
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Par Cruella le 19 Décembre 2022 à 09:40
Qui me rendra ces jours où la vie a des ailes
Et vole, vole ainsi que l'alouette aux cieux,
Lorsque tant de clarté passe devant ses yeux,
Qu'elle tombe éblouie au fond des fleurs, de celles
Qui parfument son nid, son âme, son sommeil,
Et lustrent son plumage ardé par le soleil !
Ciel ! un de ces fils d'or pour ourdir ma journée,
Un débris de ce prisme aux brillantes couleurs !
Au fond de ces beaux jours et de ces belles fleurs,
Un rêve ! où je sois libre, enfant, à peine née,
Quand l'amour de ma mère était mon avenir,
Quand on ne mourait pas encor dans ma famille,
Quand tout vivait pour moi, vaine petite fille !
Quand vivre était le ciel, ou s'en ressouvenir,
Quand j'aimais sans savoir ce que j'aimais, quand l'âme
Me palpitait heureuse, et de quoi ? Je ne sais ;
Quand toute la nature était parfum et flamme,
Quand mes deux bras s'ouvraient devant ces jours... passés.Marceline DESBORDES-VALMORE (1786 - 1859)
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Par Cruella le 13 Décembre 2022 à 10:00
J’ai aimé des endroits
où secrètement
le soleil se laissait caresser.
Où étaient passées des lèvres,
où les mains avaient couru innocentes,
le soleil brûle.
J’ai aimé comme on brise la pierre,
comme on se perd
dans l’insensible floraison de l’air.Eugénio de Andrade
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Par Cruella le 5 Décembre 2022 à 09:10
À Frédéric Lapuchin.
À l’heure où l’ombre noire
Brouille et confond
La lumière et la gloire
Du ciel profond,
Sur le clavier d’ivoire
Mes doigts s’en vont.
Quand les regrets et les alarmes
Battent mon sein comme des flots,
La musique traduit mes larmes
Et répercute mes sanglots.
Elle me verse tous les baumes
Et me souffle tous les parfums ;
Elle évoque tous mes fantômes
Et tous mes souvenirs défunts.
Elle m’apaise quand je souffre,
Elle délecte ma langueur,
Et c’est en elle que j’engouffre
L’inexprimable de mon cœur.
Elle mouille comme la pluie,
Elle brûle comme le feu ;
C’est un rire, une brume enfuie
Qui s’éparpille dans le bleu.
Dans ses fouillis d’accords étranges
Tumultueux et bourdonnants,
J’entends claquer des ailes d’anges
Et des linceuls de revenants ;
Les rythmes ont avec les gammes
De mystérieux unissons ;
Toutes les notes sont des âmes,
Des paroles et des frissons.
Ô Musique, torrent du rêve,
Nectar aimé, philtre béni,
Cours, écume, bondis sans trêve
Et roule-moi dans l’infini.
À l’heure où l’ombre noire
Brouille et confond
La lumière et la gloire
Du ciel profond,
Sur le clavier d’ivoire
Mes doigts s’en vont.Maurice Rollinat - Les Névroses *
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Par Cruella le 23 Novembre 2022 à 10:10
Puisque tout ce qui est de vie
Se relie,
Nous nous soumettrons
À, la marée qui emporte la lune,
A la lune qui ramène la marée,
Aux disparus sans qui nous ne serions pas,
Aux survivants sans qui nous ne serions pas,
Aux sourds appels qui diminuent,
Aux cris muets qui continuent,
Aux regards pétrifiés par les frayeurs
Au bout desquelles un chant d'enfant revient}
A ce qui revient et ne s'en va plus,
A ce qui revient et se fond dans le noir,
A chaque étoile perdue dans la nuit,
A chaque larme séchée dans la nuit,
A chaque nuit d'une vie,
À chaque minute
D'une unique nuit
Où se réunit
Tout ce qui se relie'
A la vie privée d'oubli
A la mort abolieFrançois Cheng *
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